Les rencontres de la CRERCO

2025

Pour cette édition 2025, l’équipe de la CRERCO remercie grandement Monsieur le Maire de Moussan (11) et ses agents pour leur accueil, l’ensemble des intervenants et la quarantaine de participants.

MATINÉE
Le contexte de la mise en œuvre de la séquence ERC biodiversité en région et les outils de génie écologique ont été rappelé en introduction par Vassilis Spyratos, directeur de l’écologie à la DREAL Occitanie . Ce dernier a développé l’importance des enjeux de restauration écologique et de la montée en compétences des acteurs du territoire sur cette thématique. Des budgets conséquents vont être engagés sur la restauration des habitats dégradés, c’est pourquoi la CRERCO, en tant que réseau d’acteurs du territoire, est un lieu privilégié d’échanges pour partager des retours d’expériences sur ce sujet.

Fabien Lépine, du Conservatoire d’espaces naturels (CEN) d’Occitanie, a débuté la matinée en présentant les différentes méthodes de réouverture et d’entretien des milieux. Les échanges avec les membres de la CRERCO ont permis de tirer plusieurs enseignements tels que :

  • L’importance d’anticiper en réalisant systématiquement un diagnostic pastoral le plus en amont possible du projet.Il faut compter entre deux et trois ans entre le début des échanges avec les parties prenantes et la réalisation de la compensation avec l’installation d’un troupeau.
  • La densité de troupeaux présents sur le territoire régional est un enjeu, compte-tenu de la difficulté d’accès au foncier pour les agriculteurs. La compensation peut être une réponse face à ces difficultés, notamment dans des secteurs comme le Gers ou les Hautes-Pyrénées.
  • Les espèces utilisées (ovin, bovin, caprin et équin) apportent des réponses différentes et complémentaires en fonction des situations. Par exemple, la force du pâturage ovin réside dans le nombre de bêtes travaillant une parcelle en même temps, là où le pâturage bovin aura un meilleur effet mécanique sur la végétation en piétinant différemment les espaces et en navigant plus efficacement dans les milieux fermés (ex : chênes kermès ou chênes des garrigues).
  • La limitation des effets négatifs des traitements antiparasitaires des troupeaux sur le milieu peut être réalisée en priorisant les produits à faible rémanence et/ou en « sacrifiant » une zone où le troupeau sera stationné quelques semaines le temps que la rémanence soit passée . Par ailleurs, les herbivores pratiquent l’automédication en consommant certaines plantes qui préviennent la survenance de maladie. Il peut être intéressant de pratiquer quelques semis de ces plantes avant l’arrivée du troupeau.

Steve Brieu, Christophe Jauneau et Vincent Parnin , de l’Office National des Forêts (ONF), sont ensuite revenus sur les enseignements tirés de la réouverture de milieux boisés en zone de plaine et en zone de montagne.La présentation et les échanges qui ont suivi avec les membres de la CRERCO ont permis de tirer plusieurs enseignements tels que :

  • Une attention particulière doit être donnée à la création d’une mosaïque de milieux et au choix des méthodes utilisées pour la réalisation de l’ouverture. Ainsi, des méthodes trop impactantes comme que le broyage des végétaux n’est pas satisfaisante et conduit souvent à la banalisation des habitats.
  • Une convergence possible entre les mesures dédiées à la lutte contre les incendies (type DFCI) et des mesures de réouverture des milieux, si l’entretien est assuré par du pâturage.
  • Une vigilance doit être maintenue quant à l’acceptation sociale du changement de paysage induit par l’ouverture d’un milieu boisé. L’ouverture de ces milieux peut se justifier auprès des habitants par l’intérêt de ce type de travaux dans la prévention des feux de forêt. Un travail de concertation doit être engagée avec la commune, les habitants, …
  • La mise en tas des végétaux peut-être une solution pour les ligneux en alternative à l’export systématique et au broyage afin d’augmenter le volume de bois mort au sol qui bénéficie à tout un cortège d’espèces.

Florence Oberlin, de l’Union Professionnelle du Génie Ecologique (UPGE), a par la suite présenté les missions de l’UPGE qui œuvre à la structuration de la filière et à la formation de ses adhérents :

  • Réunir les entreprises qui œuvrent dans le domaine du génie écologique et animer le réseau.
  • Elaborer et piloter une stratégie de structuration.
  • Représenter la filière aux niveaux national et régional.
  • Mettre en œuvre les actions pour développer et valoriser les compétences des professionnels.

Caroline Kanel, de l’Etablissement Public Territorial de Bassin (EPTB) Vistre Vistrenque, a poursuivi en présentant les travaux de renaturation engagés sur le bassin du Vistre (34) afin de revitaliser la rivière. Avec un recul de plusieurs années, ces travaux ont apporté de nombreux bénéfices comme :

  • Réduire les apports en pollutions directes et diffuses,
  • Redonner une morphologie qui permette un fonctionnement écologique satisfaisant,
  • Réduire les apports en crue,
  • Permettre aux habitants de se réapproprier les rivières.

Les échanges avec les membres de la CRERCO ont permis de tirer plusieurs enseignements tels que :

  • L’importance de prévoir une sensibilisation de la population,
  • L’efficacité de la colonisation naturelle des berges par la végétation spontanée plutôt que par des travaux de plantation coûteux et peu efficaces,
  • Le coût moyen de 1 million d’euros par kilomètre de linéaire de ce type de travaux, d l’achat du foncier au suivi post-travaux,
  • L’importance de semer un couvert végétal rapidement après les travaux pour éviter l’installation de plantes exotiques envahissantes,
  • Des résultats rapides et probants : réduction des crues, ralentissement du cours d’eau, piégeage des pollutions, création de corridors de biodiversité, retour rapide et significatif d’espèces jusque là absente du secteur (ex : castor).

Pour clôturer la matinée, Vincent Dumeunier et Michel Jaubert, du Conseil départemental de l’Aude ont présenté un retour d’expérience relatif à la rocade « EST » de Narbonne et aux mesures compensatoires liées à la dérogation à la destruction d’espèces protégées. Les habitats impactés par cet aménagement routier consistent en un ensemble de zones en déprise viticole, de zones rudérales et d’un réseau hydraulique afférent.

Les mesures d’évitement et de réduction du projet ont consisté à :

  • éviter les stations d’Aristoloches (Diane),
  • conserver certains arbres et certaines zones humides créées à l’occasion de l’urbanisation ou étant le résultat de l’absence de gestion des réseaux hydrauliques (déprise agricole),
  • adapter le calendrier des travaux selon la faune présente,
  • créer des passages pour la petite faune pour maintenir les connexions écologiques,
  • maintenir les lisières et à planter des arbres et arbustes le long de la rocade,
  • créer un « hop-over » qui permettra de guider les chiroptères au dessus du trafic routier,
  • mettre en place des bassins de rétention adaptés à la faune sauvage,
  • mettre en place une gestion écologique aux abords de la zone d’emprise,
  • choisir les zones de dépôt, de stockage et de bases de vie en évitant les secteurs à enjeux écologiques pendant la phase travaux.

Les mesures de compensation, sur 14 ha, ont visé à compenser l’impact sur :

  • le Campagnol amphibie (gestion de canaux et fossés),
  • les milieux ouverts par l’entretien d’espaces rouverts,
  • la matrice écologique paysagère semi-bocagère,
  • les reptiles par l’aménagement de dispositifs favorables,
  • la lutte contre les espèces envahissantes,
  • l’avifaune par l’installation de nichoirs.

APRES-MIDI
Les membres de la CRERCO ont ensuite été invités par le Département de l’Aude à découvrir certaines mesures de compensation mises en œuvre dans le cadre de la construction de la rocade de Narbonne : plantation de haies, création de mare, installation de pierriers, et restauration d’une prairie à brome.

Ils ont pu échanger sur les difficultés de mise en œuvre de la compensation sur le terrain, notamment sur :
– Les difficultés liées à la sécheresse et aux dégâts de sangliers vis-à-vis de la haie,
– La cohabitation parfois difficile entre les ânes présents pour le pâturage et les riverains, nécessitant un effort de pédagogie continue,
– La difficile reconstitution d’une prairie à braume dans le contexte de sécheresse de 2022 et 2023,
– L’échec de la reconstitution d’une mare (asséchement),
– Les résultats mitigés des dispositifs reptiles.

Néanmoins, la gestion compensatoire menée par le Conseil départemental sur le site a permis de faire évoluer les milieux naturels et semi-naturels de façon importante. Initialement d’état dégradé puisque composé de cultures de tournesol, de vignes et de quelques friches, le site se compose aujourd’hui d’une mosaïque de milieux ouverts et semi-ouverts plus diversifiés. Si l’intégralité des mesures mises en place n’a pas permis pour l’instant de recenser l’intégralité des espèces objets de la dérogation, la compensation a permis une certaine plus-value environnementale.

Un grand merci à toutes et à tous et surtout à bientôt pour la suite des travaux de la communauté !